Acheter une voiture diésel revient aujourd’hui à passer du côté obscur de la force. Tous les jours, on apprend de nouvelles informations quant à l’émission de particules polluantes, l’interdiction par telle ville de cette énergie à horizon 10 ans, et les défenses des diésélistes bien sûr, qui jurent mordicus que la voiture diésel, correctement équipée, n’est pas nocive, contrairement aux différentes affirmations.
Une chose est sûre, plus la voiture est petite, moins il est intéressant de la prendre en diésel. Les consommations d’une compacte sont désormais quasi similaires, et la fameuse autonomie doublée d’une diésel sur une essence se réduit d’année en année. Seuls les gros gabarits, les 4×4 de prestige et les berlines haut de gamme sont en ligne de mire, et d’ailleurs – sur les SUV en tout cas – les ventes des versions essence sont infinitésimales.
Mais admettons.
Considérons que nous habitons un environnement où le diésel est proscrit.
Que nous reste-t-il ? L’essence, oui. L’hybride aussi. Rechargeable mais aussi classique. Et l’électrique, évidemment.
Nous voilà partis en ville, sur route et sur autoroute avec quatre berlines haut de gamme.
- Une Tesla Model S P100, seul modèle 100% électrique ;
- Une BMW 740e, pour l’hybride essence rechargeable ;
- La nouvelle Lexus LS 500h, encore abonnée à l’hybride essence classique ;
- La nouvelle Audi A8, en version essence TFSi, 340 chevaux.
C’est d’ailleurs globalement la puissance que délivrent tous ces modèles, hors Tesla, où le couple moteur et l’accélération ne sont pas comparables.
D’abord, c’est indéniable, chacun de ces modèles a des qualités.
Nous avons commencé notre road trip avec l’Audi A8.
Brillante de technologie, silencieuse, ultra confortable avec sa suspension pneumatique, l’Audi A8 rassure. C’est une berline statutaire allemande, son classicisme, ses lignes sobres mais design, la qualité des matériaux à l’intérieur, tout cela c’est du sérieux. De plus, des détails comme les aérateurs intérieurs qui sortent des trappes des applications de bois c’est très bien étudié pour la sobriété et le luxe du design intérieur.
Au point de vue de la conduite, une Audi c’est une Audi. Avec son système quattro, bien qu’essayée à la fin du printemps, la voiture est stable, et là encore ça rassure. Les accélérations sont là, même si ces 340 chevaux font plus fureur sous le capot d’une RS3 que mouvant les 2 tonnes de la grande A8, même ici, en version courte. Le 6 cylindres a un petit chant feutré, inutile d’activer le mode « dynamic » qui voudrait faire d’un ténor un baryton mal imité. Laissons cela aux versions diésel, où là, oui, on a l’impression d’un coup de conduire un V8 américain.
Enfin, voyons nos données de consommation. Un petit écran sur le tableau de bord nous indique la conso instantanée. C’est là qu’on a un peu mal au portefeuille (outch) quand on est pas bien renseigné. Sous le soleil de la Riviera, les enfants dormant derrière, on n’est pas très écolo, mais on ne coupe pas le contact pendant que Madame achète des bricoles à la pharmacie. Bah non, alors le V6 fonctionnant, le calculateur monte comme un crédit revolving : 30, 32, 36 litres aux 100 km… aïe, aïe, aïe … mais en réalité, il faudrait rester comme cela une heure avant que cela se ressente vraiment.
Sur l’autoroute, je n’ai pas vraiment réussi à descendre en dessous des 9 litres/100km. En ville, on est largement à 13 ,14 , 15 litres/100km mais rarement au dessus à moins de conduire comme Fangio.
Résultat : l’essence sur une grosse berline, c’est bien, c’est feutré, ça ne claque pas au démarrage, mais malgré le temps qui passe et les efforts des ingénieurs, on n’est pas encore parvenu à faire des moteurs vraiment efficients.
Restons allemands. Modèle essayé: BMW 740e
Il s’agit de la version plug-in de la série 7 de dernière génération.
Pour avoir conduit toutes les générations de série 7 depuis la e23, il y a clairement une forme de continuité que l’on ne veut pas faire disparaître. La série 7 n’a jamais eu le succès commercial de la classe S, ne l’a jamais vraiment recherché, s’est souvent posé comme la rivale sportive, la classe allant avec. Au fil des générations, le luxe dominant, elle peut égaler désormais les rivales de Stuttgart, et c’est un peu comme les adeptes de la simple ou de la double fente dans une veste de costume, il y a deux écoles, rapprochées mais existantes.
Côté mécanique, le hic principal pour les béhémistes traditionnels, c’est qu’on abandonne le légendaire 6 cylindres en ligne qui équipe les 740i pour un 4 cylindres affublé d’un moteur électrique. Le hic que je constate, moi, en essayant cette voiture, et en me précipitant direct sur un trajet Paris-Chantilly-Vaux le Vicomte-Chantilly… c’est que ma réserve en énergie alternative a fondu comme une banquise en plein réchauffement climatique.
La quarantaine de km disponible en électricité a disparu, la voiture ayant géré toute seule, et pour mon retour de Vaux à Chantilly, je n’ai pu compter que sur mon bon vieux 4 cylindres, porté tout de même à 260 chevaux. Mais voilà, au volant d’une 7, j’ai envie d’un moteur de 7 et pas celui d’une Focus RS ou d’une 308 GTi (là pour le coup c’est quasiment le même).
Donc, déception côté moteur, même si, convenons en, on a un couple de 500 NM et un 0 à 100 en à peine 5 secondes et demie… En revanche, appréciation ultime pour l’ambiance générale. Cette munichoise est à une étape en dessous de sa grande soeur britannique la Rolls-Royce, qui doit – nous dit on dans l’oreillette – virer à l’électrique aussi sous peu.
A ce propos, cette 740e dispose d’une batterie lithium-ion d’une capacité de 9,2 kWh qui se recharge sur une prise domestique en moins de 4 heures et sur une prise de recharge rapide Wallbox proposée en option par BMW en moins de 3 heures… donc, en gros, si vous rechargez au bureau et chez vous, la ville en électrique, c’est vraiment la solution pour demain.
Question ultime : côté portefeuille, où en est-on? BMW revendique 2 litres aux cents. Moi j’veux bien, mais alors il faudrait qu’on s’arrête immédiatement une fois avoir épuisé toute l’électricité. Sans quoi, je dirais plutôt 6 litres /100km, mais c’est évidemment sans comparaison avec une version essence classique.
Passons chez les japonais : la Lexus LS500h
Lexus a lancé il y a tout juste quelques mois la dernière version de son vaisseau amiral. La LS500h hérite d’une longue carrière, première berline japonaise « osant » s’attaquer à la classe S, on était à la toute fin des années 80… et là où certains avaient même crié au plagiat, il faut se dire qu’au fil des années, ce modèle a clairement trouvé sa place, notamment aux Etats Unis et au Moyen Orient.
Aujourd’hui, avec sa nouvelle robe audacieuse, et son intérieur zen, elle est indéniablement japonaise, mais justement : elle affronte les allemandes avec une identité propre, qui séduit déjà plusieurs patrons de grandes entreprises en France.
A bord, j’ai envie de dire : c’est une Cadillac. On a l’impression de conduire quelque chose de très long, sur des suspensions totalement smooth… je revois encore les Lincoln Town Car et les Cadillac Fleetwood s’affaisser dans les virages dans les séries des années 70… alors on n’en n’est pas là ici, grâce à la suspension pneumatique intelligente. Par contre les nids de poule et les déformations, pas la peine d’en parler, vous ne les sentirez pas.
A l’arrière, la LS offre, comme les deux précédentes, télévision et commandes de clim séparées. On peut s’allonger dans les sièges avec des repose pieds (aussi possible sur les versions longues de la série 7 et de l’A8). A noter les 28 positions de réglages de siège et le massage Shiatsu qui chauffe en plus les lombaires et les épaules… Bref, grand luxe. Le tout dans une sérénité – encore une fois – très japonaise : les portières sont comme étanches, tout ce qui est à l’extérieur reste à l’extérieur, et c’est presque tant mieux.
Côté mécanique, Lexus comme Toyota restent fidèles à leur concept : l’hybride classique. D’ailleurs le spot de pub c’est « elle se recharge toute seule ». Oubliez les câbles, une borne autolib († 2011-2018) dispo , une borne à installer chez soi, des co-propriétaires à convaincre que si, c’est mieux pour la planète, bref.. oubliez tout cela, la voiture se recharge SEULE.
Et ce qui est étonnant, c’est qu’en ville, elle est très très très souvent en mode électrique. Et ce malgré une autonomie annoncée en tout électrique de « quelques km ».. 2, ou 3, ou 4… mais voilà,… la LS c’est la fourmi… elle compte ses petites économies, et dès que le moteur thermique l’a convenablement rechargée, elle rétrocède cette énergie pour les déplacements que l’on a besoin.
Sur route, on avait l’habitude avec Toyota/Lexus des boîtes CVT avec l’impression de mobylette… très vite en sur régime lorsqu’on se mettait à accélérer…Fini cette impression avec le système multistage qui régule la transmission et qui désormais atténue vraiment cet effet que moi j’appelais « mamie fait un créneau »…
Sur la conduite elle même, la Lexus se révèle moins agile que la BMW ou l’AUDI. La BMW notamment, accélère et reprend très vite avec son couple record.
Pour la consommation, Lexus annonce environ 7 litres / 100km. Bon, comme d’habitude on est un peu au dessus. Mes confrères d’Auto-Moto ont mesuré un peu plus de 11 litres… on imagine qu’ils y sont allé fort. Mais en tous les cas on est loin des 15 litres de l’essence classique.
Alors que dire de la TESLA?…
Et bien d’abord que le choix s’est fait par défaut! Et oui, elle est le seul modèle très haut de gamme en 100% électrique… quand bien même, avec une ligne rappelant les Jaguar, elle reste très belle et unique.
Sur l’ergonomie, Elon Musk ayant voulu faire différent, on est en effet dans une situation un peu étrangère.
Rappelons le, la Tesla se gère par un unique écran tactile central, comme un immense I-Pad. Pas étonnant qu’on l’appelle le smartphone sur roues… Donc on n’attendra pas d’une modèle S qu’elle soit aussi luxueuse qu’une A8, qu’une série 7 et surtout qu’une LS500. On se dira en revanche qu’elle fait VRAIMENT le créneau toute seule et que la fonction autopilot existe … mais qu’en France la législation ne le permet pas encore.
Sur la conduite, la Tesla est une véritable fusée. La version la plus puissante égale les supercars en accélération. On y prend d’ailleurs un goût monstre. EN revanche, la Tesla est dure, on est loin des suspensions pneumatiques de ses rivales. Autre handicap, la voiture est large, et le rayon de braquage n’est pas si bon. Résultat : pas très maniable en ville, surtout dire dans des parkings étroits ou dans des petites ruelles.
Sur la consommation, que vous dire ? Plus de 400 km réels en autonomie. Largement suffisant en ville lorsqu’on recharge chez soi ou au bureau. Largement assez pour faire des trajets interurbains, dans un même département. Plus fastidieux pour les longs trajets… oui, les SuperCharger sont là, mais oui il faut boire un loooooooong café le temps de la recharge, et ça c’est pas encore dans nos moeurs.
Laquelle de ces voitures de président retenir?
Si vous abhorrez le thermique, choisissez la Tesla.
Elle est unique en son genre, elle est le pionnier d’une série de voitures qui vont vite arriver. Elle est en plus « updatée » comme un smartphone. Totalement dans l’air du temps.
Pour le reste, compte tenu des difficultés à trouver des infrastructures, et vu comme le courant fond comme neige au soleil au compteur, difficile d’opter pour la 740e… je lui préfère carrément une version essence classique. Ce 4 cylindres dans une si belle voiture, je ne m’y fais pas. L’audi, en revanche, garde un avantage certain en version diésel, avec un magnifique Bi-Tdi à venir bientôt.
Reste la Lexus. Et finalement dans notre vieux pays, c’est sans doute elle qui est la mieux adaptée. Certes le plug-in est à la mode, mais le fait de recharger toute seule et permettre tout de même, beaucoup , de circuler en électrique en ville, est un soulagement considérable.
Alors oui, il faut aimer son côté oriental, son côté « plus Cadillac que Porsche Panamera« … mais c’est sans doute encore un bon choix dans un pays qui j’en suis sur verra vite ses infrastructures évoluer.