CARLOS SANTOS

Disposer de belles chaussures dans sa garde-robe est une condition sine qua none de l’élégance masculine. En effet, une tenue bien construite s’appuie sur les solides fondations, qui sont les chaussures . D’ailleurs, il n’est pas rare de voir ces gentlemen apprêtés jusqu’au cou, fervents porteurs de souliers en cuir, arborant fièrement leur collection composée d’une demi-douzaine de paires pour la semaine. Qu’à cela ne tienne, l’homme est averti mais se repose sur ses acquis : le plus souvent il se chausse auprès de marques mainstream, offrant d’assez bonnes chaussures pour un assez bon résultat.

Ces chaussures, le plus souvent vendues entre 150 et 200 euros, sont pour sûr un peu plus élégantes que ceux du quidam. Cependant, elles finissent tôt ou tard par dévoiler quelques faiblesses. Tout d’abord, leur forme est très commune. Dans cette gamme de prix, les marques peinent à proposer des formes travaillées. Ensuite, les cuirs sont souvent de qualité inégale même si dénichés auprès de tanneries de métier car elles emploient le plus souvent des grades de cuir de moindre qualité. Enfin, on peut accuser un certain manque de confort : malgré les nombreux ports, on a la fâcheuse impression que les chaussures ne se feront jamais.

Bien sûr, il est rare que tous ces défauts soient réunis et il ne fait pas de doutes que ces marques restent bon compromis pour se chausser correctement au début. Néanmoins, pour passer un cap, il est très intéressant d’investir davantage afin de goûter aux joies du soulier premium. Porter de superbes souliers, de qualité irréprochable, donne du caractère et de l’assurance à son style.

crockett and jones loafers
Une tenue simple relevée par une superbe paire de penny loafers.

Alors comment faire pour mieux se chausser ? Il faut cultiver tout d’abord son bon goût et sa connaissance de quelques enseignes de confiance. Force est de constater que le beau soulier est souvent lié à un savoir-faire géographique. L’austère richelieu noir anglais, l’exubérant mocassin italien, le racé derby français (oui je suis un brin chauvin !). Parmi ces pays de chausseurs, il en existe un dont la popularité s’est construite sur le tard : LE PORTUGAL.

En effet, le pays lusitanien est fort d’un savoir-faire séculaire dans le soulier. J’ai eu l’opportunité de tester l’un des représentants de l’artisanat portugais : Carlos Santos, un chausseur de métier auprès duquel on peut trouver ses élégances.

L’histoire de Carlos Santos

Les meilleurs chausseurs ont souvent une belle histoire à raconter. Celle de Carlos Santos débute dans les années cinquante, à São João da Madeira, une petite municipalité manufacturière du nord du Portugal. C’est à 14 ans que Carlos Alberto Rodrigues dos Santos entame sa carrière, au sein d’une usine de fabrication de chaussures portugaise du nom de Zarco. A travers les années, le jeune garçon se passionne pour le soulier et apprend patiemment le métier de chausseur.

A sa majorité, il devient vendeur pour le compte de Zarco et se fait connaître comme l’un des meilleurs commerçants de chaussures à travers la région. Lors de son vingt-et-unième printemps, il se rend en Italie où il découvre de superbes manufactures de souliers. Cette découverte lui donnera l’obsession pour les souliers de qualité.

Carlos Santos
Monsieur Santos.

Nous sommes dans les années 80 et à cette époque, l’industrie portugaise produit des souliers pour le compte de nombreuses marques européennes reconnues. Notamment pour des maisons britanniques, dont la qualité de confection était alors indiscutable. Pour l’anecdote, la mention « made in Europe » subsistait alors sur les souliers de confection portugaise. Ce n’est qu’au cours de ces dernières années que la réputation du savoir-faire portugais s’est répandue en Europe, laissant enfin place au « made in Portugal ».

Tout au long de son parcours, Carlos Santos rachète les actions de l’entreprise Zarco jusqu’à ce qu’il devienne le propriétaire. Il décide alors de mettre en place une stratégie d’internationalisation en gardant toujours une ligne de conduite claire : le respect de l’artisanat traditionnel. En ce sens, il met à l’honneur la construction cousu Goodyear, qui fera la réputation de la maison.

C’est en 2008 que Carlos Santos décide de créer la marque éponyme. Aujourd’hui la maison Carlos Santos regroupe près de 200 maîtres artisans qui mettent en œuvre leur passion et savoir-faire au service du rayonnement de l’artisanat portugais.

LE RICHELIEU NOIR

Richelieu Carlos Santos de côté

Pour ce test, je me suis orienté vers une paire de richelieus noires à semelle gomme. J’avais besoin d’une chaussure à porter dans un contexte professionnel. Mes critères étaient donc de trouver un soulier qui se marie parfaitement à un costume.

Caractéristiques techniques de ce soulier

  • Forme 234 ;
  • Richelieu à perforations ;
  • Tige en cuir noir de veau box provenant de la « Tannerie du Puy » ;
  • Doublure en cuir ;
  • Semelle en gomme « Dainite » ;
  • Montage cousu Goodyear ;
  • Lacets cirés noirs.

Packaging

Les chaussures sont livrées dans une boîte noire, texturée, arborant le nom de la marque dans une élégante police italique. On retrouve deux housses de protection en tissu noir, un chausse-pied gravé Carlos Santos ainsi qu’un carnet d’explication concernant le montage Goodyear. L’intérieur de la boîte est tapissé d’un joli motif pied-de-poule marron et taupe. Un message de remerciement est également imprimé sur l’intérieur du couvercle, expliquant la philosophie de la maison.  

Richelieu Carlos Santos packaging

La marque a délicatement enveloppé les chaussures dans du papier de soie et de la mousse afin de les protéger d’éventuels chocs lors de la livraison. Dernier détail mais pas des moindres : l’odeur. Comme lorsqu’on entre dans une voiture de sport neuve, il émane une odeur très agréable de la boîte. C’est le cuir des souliers qui embaume le tout. Cela ne sent pas l’animal – ce qui serait mauvais signe quant à la qualité du cuir – mais simplement un « parfum » d’objet de luxe, du neuf.

En somme, j’ai été très agréablement surpris par le soin apporté au packaging. On ressent tout de suite qu’on a affaire à un produit de gamme supérieure. Cette excellente expérience d’unboxing est bon présage pour la suite du test !

Une forme singulière

C’est la forme qu’on aperçoit en premier dans une chaussure. Elle donne l’allure au pied, comme le ferait un vêtement bien coupé pour souligner la silhouette. Ce richelieu se présente dans la forme 234 de la maison Carlos Santos, caractérisée par un cou-de-pied plutôt généreux et un bon soutien de la voûte plantaire.

Richelieu Carlos Santos de haut

Globalement, le soulier est assez large mais n’en demeure pas moins racé visuellement. Cette prouesse esthétique est permise grâce à une cambrure incurvée que vous pourrez remarquer sur les deux photos suivantes.

semelle Richelieu Carlos Santos
vue Richelieu Carlos Santos

Un cuir d’exception

Le second élément qui fait le sel de ce richelieu est le cuir de la tige. En effet, il s’agit d’un cuir de veau noir provenant de la tannerie française du Puy-en-Velay. Réputée pour fournir l’une des plus grandes maisons de luxe, les cuirs y sont d’une qualité incomparable. Ici e cuir sélectionné par la maison fait partie des meilleures grades de peausseries de la tannerie du Puy.

Ce cuir dit « box-calf » a été soumis à un tannage végétal extra-lent, lui conférant une grande souplesse et solidité. Par ailleurs, c’est un cuir pleine fleur, gage de grande qualité : au toucher, le cuir est à la fois délicat lorsqu’on parcourt la tige au doigt et suffisamment épais lorsqu’on appuie dessus. C’est très bon signe car le soulier résistera alors aux ports répétés ainsi qu’aux agressions extérieures. Par ailleurs, il n’y a pas de veines apparentes.

Richelieu Carlos Santos cuir brillant

Enfin, les chaussures prennent particulièrement bien la lumière, en montrant des reflets profonds. Je n’ai appliqué absolument aucun cirage avant de réaliser les photos et on a pourtant l’impression que le soulier a été entièrement lustré. Un régal pour les yeux !

Les finitions de cette chaussure

Intéressons-nous aux finitions qui font de ce richelieu une chaussure d’excellente facture. Cela peut commence par l’extérieur. Au niveau de la semelle extérieure, on retrouve une semelle en caoutchouc résistante à la pluie, aux frottements, et qui assure une stabilité quelle que soit la surface. C’est littéralement la semelle idéale quand on habite dans un environnement où la pluie peut s’inviter à tout moment. Et en hiver la semelle permet également d’éviter les glissades insoupçonnées !

Pour cette semelle « gomme », CS utilise des Dainite Made in England de la Harbourough Rubber Co, référence mondiale dans le domaine de la semelle en caoutchouc. J’ai fait ce choix de semelle en raison de la saison actuelle. Pour avoir déjà frôlé la chute à plus d’une reprise avec des chaussures à semelle cuir, ces Dainite sont au contraire tout ce qu’il y a de plus sécurisant. En outre, cette semelle en gomme isole très bien le pied contre le froid.

semelle dainite carlos santos


En observant de près, on remarque que ces richelieus sont le fruit d’un travail minutieux : .

finitions richelieu Carlos Santos
Les coutures et les découpes sont proprement réalisées

Le système de laçage comprend 5 oeillets métalliques et des lacets noirs cirés. On appréciera l’oeillet en cuir sur le bas, cousu de telle manière que les garants soient plus solides, empêchant la déchirure sur cette zone.

richelieu Carlos Santos de profil

A vrai dire, je ne suis pas un grand amateur des richelieus trop classiques, dépourvus de détails. C’est pourquoi j’ai opté pour ce modèle qui dispose d’un bout droit perforé dont les perforations sur l’avant, très régulières, ajoutent une touche mesurée d’originalité. Le résultat final est un bel équilibre entre robustesse et élégance.

Bout dur chaussure Carlos Santos
Le bout droit perforé pour davantage de caractère.

L’intérieur des chaussures est en cuir couleur chair, avec un coussinet au talon. Cela fait une différence de confort en dessous de la première de propreté de sorte que la chaussure est confortable une fois portée.

Un montage traditionnel

La spécificité de la maison Carlos Santos réside dans la maîtrise du montage traditionnel cousu Goodyear. Cette technique consiste en une double couture : une première couture qui lie la tige, la semelle intérieur et la trépointe (la bande de cuir fixée autour de la chaussure). Puis une seconde couture reliant la trépointe à la semelle extérieure (en contact avec le sol).

Explication montage Goodyear

Robuste à souhait, le montage Goodyear permet d’obtenir des chaussures solides, qu’on peut ressemeler si besoin. Théoriquement, on a donc une chaussure qui peut durer une vie si la tige est de bonne qualité et qu’on en prend suffisamment soin.

La couture Goodyear, parfaitement exécutée.

Un point d’amélioration

Avant de commander le modèle que j’ai testé, je me suis rendu en boutique chez Upper Shoes, Rue de Caumartin, dans le 9ème arrondissement. Après de multiples essayages, il s’est avéré que la taille 7,5 UK semblait parfaitement me correspondre sur la plupart des chaussants (différents de ceux du soulier testé) essayés ce jour-là.

Une fois réceptionnées, le chaussant s’est révélé trop large pour mes pieds qui sont assez fins et il m’aurait certainement fallu un 7 UK (l’équivalent d’une taille 41). Si j’évoque ce petit hic, c’est notamment parce que je pense que la marque pêche en ce qui concerne l’information. En effet, si vous vous rendez sur le site, il est difficile de distinguer les collections ou encore les particularités des différents chaussants. En l’occurrence, mon erreur de taille est liée au chaussant et une indication plus précise aurait permis de m’orienter vers une autre forme plus adaptée.

Moralité : mieux vaut essayer avant d’acheter !

Mon constat final

Avec l’expérience, je pense qu’il est possible de diviser le marché du soulier Goodyear en deux grandes catégories :

  • L’entrée de gamme, à partir de 150 euros jusqu’à 230 euros en moyenne, intéressante pour se procurer ses premières paires sans trop de risques. Nécessairement, ont des cuirs de moindre qualité et les finitions ne sont pas toujours appliquées ceux compris entre 100 et 200 euros, intéressants
  • Le haut-de-gamme, à partir de 400 euros, avec des chaussures plus travaillées, de très belles peausseries et un travail soigné.

Quid du milieu de gamme ? A mon avis, il n’est pas spécialement representé et se partage entre des marques proposant des chaussures de qualité équivalente ou à peine meilleures qu’en entrée de gamme et ce à des prix gonflés. L’autre partie, absolument minoritaire, c’est une poignée de chausseurs traditionnels, qui propose une offre très qualitative à des tarifs placés. Carlos Santos en fait partie et rogne ses marges afin de proposer des chaussures accessibles pour tout un chacun .

Les chaussures Carlos Santos pourraient coûter le double de leur prix en restant parfaitement légitimes tant elles sont d’excellente confection. En somme, j’ai été stupéfait par la qualité et l’expérience offerte par la maison portugaise, c’est pourquoi je vous la recommande sans aucune hésitation.

L’idéal est donc de découvrir la marque en magasin. Pour ceux qui le peuvent, nous vous recommandons de vous rendre aux Journées Exceptionnelles Carlos Santos qui se déroulent en fin de semaine, voici les dates et adresses :

  • Jeudi 21 novembre (12h-19h30) à Upper Shoes, 1 rue Caumartin 75009
  • Vendredi 22 novembre (14h-18h) au Corner Printemps de l’Homme, 64 Boulevard Haussmann 75009

Pour l’occasion, la marque dévoilera des modèles exclusifs réalisés pour son revendeur Upper Shoes. Un coloriste, spécialiste des patines sur chaussure, sera présent sur place et vous bénéficierez d’un ressemelage gratuit sur la paire de souliers de votre choix pour tout paire Carlos Santos commandée lors de ces journées.

D’une paire deux coups chers lecteurs,

A très bientôt,

Farid

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