HORWEEN LEATHER

Visite Tannerie Horween Chicago

C’est une des plus vieilles tanneries encore en fonctionnement dans le monde. La « Horween Leather Co. » est installée à Chicago au 2015 North Elston Avenue depuis 1920, même si la création de cette tannerie mythique remonte à 1905. Elle est à cette époque située non loin du quartier des abattoirs sur Division Street, proche des sources de matières premières. Chicago produit à la fin du 19ème siècle environ 80 % de la viande consommée aux Etats-Unis. Ici les peaux affluent et la Chicago River est à deux pas. L’endroit est idéal pour installer une tannerie.

L’histoire de Horween

2015 elson street Tannerie Horween


C’est le projet d’un immigré ukrainien arrivé au Nouveau Monde en 1893. Un certain Isidore Horween. C’est dans son pays d’origine qu’il apprend ce métier qu’il viendra ensuite exercer aux USA. Installé à Chicago, il rencontre le propriétaire d’une tannerie qui présentait ses cuirs lors d’une foire. Alors qu’Isidore regardait les peaux avec attention cette personne lui dit : « c’est un beau cuir n’est-ce pas ?« . Isidore lui répondit « oui très bien, mais il pourrait être encore mieux« . Piqué au vif, cette personne lui rétorqua : « si vous pouvez rendre ce cuir encore plus beau, rendez-vous lundi matin dans mon bureau« . Isidore se fit embaucher et travailla pendant 12 ans pour cette tannerie avant de lancer en 1905 sa propre entreprise qu’il nomma « I. Horween ».

Il se concentre au départ sur les cuirs à affuter, épais et robustes. C’était un élément indispensable pour avoir un coupe chou prêt à raser. Mais le développement des rasoirs de sûreté bouleversa l’industrie du coupe chou et Isidore dû rapidement se concentrer sur d’autres cuirs plus souples destinées à l’industrie des accessoires et des souliers. Au fil du temps la tannerie se développa et Isidore acheta l’entrepôt d’un concurrent pour y installer une seconde usine. Il avait deux fils et pensait à cette époque que c’était une bonne idée d’en avoir une pour chacun. Mauvaise idée. Le premier lieu ferma finalement pour ne garder qu’une seule adresse en 1927. Celle que j’ai visité.

Un peu plus tôt, « I. Horween » devint la « Horween Leather Co. » et l’entreprise se diversifia. Elle commença à fabriquer de nombreux types de cuirs dans des domaines très spécialisés comme les joints des pompes à haute pression ou des équipements pour l’automobile. L’étroite relation entre Horween et le monde du sport débuta quant à elle dans les années 30 et 40 grâce aux deux fils d’Isidore, Ralph et Arnold, tous deux champions de football américain avec l’université d’Harvard où ils avaient étudié. La tannerie avait aussi la chance d’être située à Chicago où il y avait déjà l’équipe des Bears (NFL) et le siège du fabricant de ballons Wilson. Le cocktail idéal pour aider cette marque à développer le ballon parfait. Si l’un trouvait une idée, Horween fabriquait le cuir, Wilson fabriquait le ballon et les Bears pouvait le tester de suite en entraînement au Wrigley Field. Horween n’a cessé depuis cette époque de fournir la National Football League (NFL) dont elle est aujourd’hui fournisseur exclusif, tout comme la National Basketball Association (NBA). Les cadres en bois accumulés au mur affichent avec fierté les aplats des ballons fabriqués en cuir Horween utilisés au Superbowl.

L’entreprise a résisté à tout. Elle fournissait l’armée pendant la guerre. Puis toute l’industrie de le chaussure, et puis comme dans tous les domaines elle a pris les délocalisations de plein fouet. Elle a plié. Elle s’est adaptée. Mais elle n’a jamais lâché. Le secret ? Faire ce dans quoi elle excelle, encore et encore, sans faire de compromis sur la qualité. En expliquant à ses clients que le produit est cher pour une bonne raison : parce qu’il est meilleur. En utilisant des procédés artisanaux éprouvés sans chercher à devenir des géants. C’est ainsi chez Horween. Et le fait que Nick, l’arrière-arrière petit-fils du fondateur soit désormais aux commandes n’y est pas pour rien. La mémoire de ses ancêtres est partout.

La réputation est donc surtout celle d’un savoir-faire, et notamment pour la fabrication d’un cuir bien particulier qui fait son succès autour du globe : le cordovan.

Le shell cordovan de Horween

Le cordovan est ce cuir de cheval fabriqué par une poignée de tanneries dans le monde. Il est réputé pour sa durabilité, sa souplesse et sa couleur profonde. C’est aussi un cuir qui prend une délicieuse patine au fil du temps. Le « shell cordovan » ou « genuine shell cordovan » comme il est appelé en anglais correspond aux « fesses » du cheval. C’est une partie qui est soumise à de fortes torsions lors de la vie de l’animal et qui donne un cuir particulièrement dense. On extrait d’un cheval un peu plus de 0,5 m2 de cuir. Cela représente environ une paire de souliers. Vous comprenez combien ce cuir est rare. C’est un produit naturel tanné pendant environ six mois avec des graisses, des huiles et des cires. La technique de tannage comprend une centaine d’étapes, dont la plupart sont réalisées à la main ou avec des machines anciennes, pratiquement inchangées depuis la révolution industrielle.

Toutes ces caractéristiques ont rendu ce cuir très prisé, et particulièrement au japon. Le gérant d’une boutique de chaussures de Chicago me confiait d’ailleurs que certains japonais qui passent aux USA peuvent s’acheter 2 à 3 paires d’Alden en cordovan d’un seul coup car elles sont 20% à 30% plus chères dans l’archipel. Une petite fortune, mais un vrai investissement. C’est un achat pour une vie.

Une visite des atelier Horween

Nick Horween

J’ai eu l’opportunité et le plaisir de pénétrer dans ce lieu unique. Reçu par Nick Horween, nous avons fait ensemble le tour du propriétaire des 5 étages de la tannerie. L’atmosphère y est chaude et humide. Les murs sont maculés de tâches sombres des tannins qui transpercent le cuir. Les eaux troublées trempent des peaux molles pendant des jours et les machines en bois portent les traces de l’usure du temps. Je demande à Nick depuis combien de temps celles-ci au fond sont là. Il me répond un sourire aux lèvres : « 6 mois. On fait un job vraiment salissant tu sais« .

On marche ensemble dans les allées remplies de peaux tannées. L’endroit est une fourmilière où des hommes frappent, grattent, poncent, cirent, huilent, sèchent cette matière première brute lugubre pour en faire un objet de désir. On est loin des étagères feutrées des boutiques qui vendront les pièces fabriquées dans ces cuirs prestigieux. Mais ici on sait ce qu’on fait. Les gestes n’ont pas de traces de fébrilité. Surtout pas aux postes où on travaille le cordovan. La matière est trop précieuse pour être placées entre des mains inexpérimentées. Le cuir est rogné au millimètre pour en extraire le « shell cordovan » du reste de la pièce de cuir. Nick me fait faire un tour complet de cette usine photogénique en prenant le temps de tout m’expliquer avec soin. Je m’arrête et caresse une peau maculée qui vient d’être frappée avec le grain des ballons de NFL. Le « W » de Wilson est bien là. Je n’aurais pas soupçonné au moment de commander mon premier ballon de football américain aux USA sur eBay quand j’avais 18 ans que je viendrais un jour sur les lieux où sont fabriquées ces peaux.

cuir ballon wilson
Stock cuir Visite Tannerie Horween
cuir brut Horween
séchage cuir plaque
sechage cuir Tannerie Horween
carton Tannerie Horween
cuir horween
Tannerie Horween cuir

Merci à Sean pour l’entremise et à Nick pour la visite.

STUDIO VGL © Depuis 2012 | Mentions Legales

Remonter