Il y a trente ans, quelque part entre deux décennies et trois lavages de trop, un homme tombe sur un vieux jean Levi’s 501 modèle 66. Une pièce deadstock, oubliée des radars mais pas de l’Histoire. C’est un coup de foudre textile. Une rencontre avec un denim de transition : pas encore vintage, plus vraiment moderne.
Un jean né à la fin des années 70, quand l’Amérique repliait les banderoles de Woodstock pour dérouler celles de la production de masse. Le 501 Type 66, c’est la fin des rivets cachés, l’apparition d’un coton plus lisse, d’une coupe plus fuselée. Moins sauvage, mais pas domestiqué pour autant. Ce jean-là ne cherche pas à plaire, il porte la trace d’un monde qui change. Un entre-deux subtil. C’est de cette vibration entre les époques qu’est née Allevol.
Une marque qui ne fait pas de bruit mais qui a du sens
Créée à Londres en 2005 par Taka Okabe, Allevol est une marque pour ceux qui savent que le style n’est pas dans le cri, mais dans l’écho. Pour ceux qui lisent les étiquettes comme d’autres lisent un poème : lentement, avec attention, jusqu’au dernier composant.
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Allevol signifie “All Evolution”. Et c’est bien de cela qu’il s’agit : évoluer avec élégance, sans trahir l’essentiel. À la surface, des jeans, des sweats, des t-shirts. En profondeur, un manifeste. Chaque pièce est fabriquée au Japon, dans les ateliers d’Okayama, bastion du denim artisanal. Mais la marque n’est pas un simple label “made in Japan” pour amateurs de selvedge et de jargon technique. C’est un état d’esprit. Une résistance à l’éphémère.
Le jean « ROKU ROKU 66 »
Le modèle phare ? Le Roku Roku 66 (六六), un hommage au Levi’s 501 Type 66. Mais loin de l’imitation servile, Allevol y insuffle son œil, sa main, sa retenue. Le tissu ? Un denim selvedge 11,5 oz tissé en left-hand twill à Okayama. Un tombé franc, un toucher doux, et une capacité à vieillir avec toi, pas contre toi.
La coupe ? Droite mais légèrement fuselée, avec un peu d’aisance à la cuisse — pour marcher dans la ville comme on traverserait une époque. Les finitions ? Coutures coton orange et jaune, boutons “donut” avec motif laurier, patch en papier estampé à la main, selvedge discret mais assumé. La philosophie ? Ne rien surjouer. Tout soigner.
Un vestiaire qui évite les effets de mode
Mais Allevol ne s’arrête pas au denim. Son vestiaire est une promenade dans l’essentiel. Un uniforme qu’on peut porter encore et encore, chaque jour. Pas d’esbroufe, pas d’effet waouh : juste ce sentiment rare que l’on tient une pièce faite pour durer, physiquement et symboliquement.
Les sweats Loopwheel
Tricotés sur des métiers circulaires d’avant-guerre — au sens strict, pas figuré — ces sweats sont l’exact opposé du molleton impersonnel qui fatigue au deuxième lavage. Leur maille dense mais respirante, sans couture latérale, épouse le corps sans l’enfermer. Chaque pièce nécessite des heures de travail et une cadence volontairement lente, presque obstinée, comme un artisan qui refuse d’accélérer pour plaire à la montre. Ce sont des sweats avec une mémoire. Ils ne sont pas faits pour impressionner sur Instagram, mais pour devenir ton pull de tous les jours, usé aux coudes, adouci aux poignets. Un vêtement compagnon, fidèle comme un bon chien.
Les t-shirts Heavy Duty
On ne change pas une icône. Allevol ne réinvente pas le t-shirt, il le restaure dans sa plus noble simplicité. Un jersey épais, sans mollesse. Une coupe droite, sans compromis. Une poche plaquée, sans fioritures. Le genre de t-shirt qu’on enfile sans réfléchir, mais qu’on finit par chérir. C’est le vêtement silencieux par excellence — celui que personne ne remarque, mais que tous envient à force de le voir tenir bon, lavage après lavage. Une armure de coton pour les minimalistes exigeants.
Les vestes & manteaux
Chez Allevol, la veste n’est pas un caprice de saison, mais un morceau de mémoire textile. La Easterner Jacket, c’est le vêtement de ranchmen civilisé, une réinterprétation du western jacket des années 50, avec un col pointu et une coupe qui file droit sans faire le cow-boy. Quant au Pat Duffle Coat, il revisite le manteau des officiers britanniques avec une justesse japonaise : plus sobre, plus propre, plus concentré. Ici, chaque pièce est un chapitre de style — on n’y crie pas le passé, on le murmure avec élégance.
Et les mailles Inverallan
Tricotées à la main, mailles après mailles, par les artisans d’Inverallan en Écosse, ces pièces sentent la lande humide, les cheminées de granit, et l’odeur de la laine sèche dans un cottage battu par les vents. Mais n’y vois pas un folklore figé. Ces pulls, ces gilets, ces écharpes, sont taillés pour durer autant que pour traverser les saisons, en s’imprégnant de ton quotidien. Ce ne sont pas des tricots d’apparat. Ce sont des compagnons d’hiver. Des pièces dans lesquelles on vit, qu’on répare, qu’on garde.
Pourquoi porter Allevol ?
Parce qu’on en a assez du “fast”, du “hype”, du “drop”. Parce qu’on veut des pièces qu’on portera encore dans dix ans — et qu’on regardera avec tendresse, comme une vieille photo qui n’a pas pris une ride. Parce que la beauté, parfois, se trouve dans le silence d’une couture bien faite.