Vin du mois : Weisser Burgunder 2012

La dégustation n’est pas qu’une simple histoire de goût, c’est aussi l’art de savoir vivre une expérience unique dans un lieu atypique. On déguste avec ses cinq sens. Ce mois ci, Vincent nous fait découvrir à sa manière son voyage épicurien en terres allemandes. Bon voyage !

Un vin est un terroir, un terroir un récit.

Un terroir…

Etait-ce un souvenir qui m’avait mené là-bas ? Le souvenir d’avoir déjà passé du temps attablé dans quelques tavernes…celui de lever un verre de liquide doré et le contempler devant le soleil filtré d’un parc verdoyant. En tout cas ce jour là, j’ai pris l’avion. A 8000 mètre d’altitude, la Lufthansa déjà faisait à mes papilles se souvenir de la grande ville des montagnes tyroliennes, Munich. J’inaugurais le séjour d’un Riesling bien mérité. Il n’y a pas de vigne à Munich. Il y a des brasseries, des tonneaux de malte en fermentation, des marmites de choux cuisant dans un mélange sucré … des jarrets de porc se braisant lentement devant nos yeux.

Pourquoi y aller ? L’esprit du tonneau, l’âme du goulot. On y buvait bien, je m’en souviens et dans un cadre qui invite au plaisir. Cette fois pas de producteur précis. Il faut parfois savoir rendre la culture du vin plus accessible et je le décrète : Au contraire de bien des villes en France, à Munich n’ayez crainte, votre table sera toujours accompagnée d’un grand breuvage. Je n’évoquerai ici pas la bière et pourtant dieu sait si aujourd’hui encore je cherche son équivalent dans le monde … non, je vous parlerai de ces blancs allemands des abords vosgiens, au sortir des ombres de la forêt noir. Riesling, Sylvaner, Gewurtz, Pinot Gris et autre Müller Thurgau…les robes d’or de la ville aux dizaines de clochers scintillants ; la ville chef d’œuvre d’un roi fou.

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Un récit…

On raconte de Ludwig de Bavière qu’il était cinglé. La folie habille parfois si bien les hommes. Bien sûr, le recul de l’histoire nous rend la tache plus aisée. Seul le résultat reste. Ludwig s’enticha de l’Italie et de son art, de ses saveurs. Munich transparaît encore aujourd’hui comme la Florence tyrolienne. Pastiche d’un roi fou, objet de culte d’un adorateur aux pouvoirs infinis. Munich possède sa colonnade magnifie de lions de pierre, son palais piti, ses cathédrales baroques aux ornements discrets qui vont si bien à cette toile de fond alpine, blanche de neige. Il faut alors passer le faste de l’Odéonsplatz, lancer ses pieds dans le Munich d’antan et découvrir alors ces brasseries aux bois chaleureux à la marqueterie impeccablement vernie.

Quel accompagnement ?

Grosse tablé de francs buveurs attablés autour de chants locaux ou de brouhaha joyeux. Il faut regarder à travers les vitres striées de petits carreaux des vastes biergarten. Ludwig est toujours là, imperceptiblement présent dans l’âme de ces munichois hédonistes qui errent un verre à la main dans le Viktualien markt à la recherche de leur pitance du midi. On n’y fait pas dans le maigre. Entouré de la grande beauté de la ville, les jarrets s’invitent au goûter en même temps que les grasses huîtres et les gambas qui mêlent leurs odeurs à celles plus épicées de plats exotiques et de la suave odeur de cochonnaille des charcuteries d’Italie ou de France. Au rendez-vous des mangeurs, Munich est un carrefour.

Un vin…

A Munich je le confesse, j’arrivais la tête vide de connaissances, le cœur remplit de la volonté de boire autrement, de boire ce que l’on m’offrirait, comme ça. Carte sommaire mais bien achalandée, je regardais le serveur avec des yeux immenses qui sentaient l’ignorance. On m’aiguilla, on me projeta vers les rieslings et les Müller Thurgau. Bien sûr, j’en avais déjà goûté. Mais je m’étais imposé pour ce séjour de ne pas rechercher la rareté, de boire le tout venant, de comprendre le buveur manant qui n’intellectualise pas la grappe mais la savoure.

Un jour que je ne l’attablais pas, j’errai bien accompagné dans un marché où l’on trouvait tout ce que l’estomac peut désirer. Je pénétrais dans un modeste troquet à l’extrémité de la place du marché. Les gens y allaient et venaient, un verre à la main. Le liquide semblait de qualité. Superbe couleur d’ambre, légère pellicule de gras sur le rebord du verre. Je salivais discrètement en poussant la porte. Je faisais comprendre ma grande passion du vin dans un très mauvais allemand. La tenancière rigola. Elle m’indiqua sur la liste avec d’étranges onomatopées les vins qu’elle me conseillait. J’optais pour la maison GIES – DÜPPEL et son Weisser Burgunder 2012.

Une ambiance.

Vous savez quoi ? Je me trouve bien incapable de le décrire précisément…mais je l’ai adulé. Je l’ai aimé parce que je l’ai bu en écoutant des conversations en allemand. Au goût je m’en souviens il était frais, friand, un vrai tonifiant généreux. Ce vin ne sentait pas que son terroir. Il y avait sans doute dans mes souvenirs de l’abricot et de l’ananas … ce qui m’as marqué, c’est la manière dont je l’ai bu. En marchant sur ces pavés qui secouaient le vin et m’envoyaient en pleine narine les senteurs parfumées du breuvage tandis que j’aspirais à plein poumon l’odeur de la ville : ces saucisses fumées, ces jarrets qui grillent et ces bretzels légèrement salés qui chauffaient à mes narines de français habitué aux effluves matinales si graciles des boulangeries en pleine action. J’ai bu un vin qui ressemblait à la culture de son pays. Honnêtement, c’est si rare.

Un tout…

Le vol du retour arrive. Bientôt le verre à la main nous ne battrons plus les pavés. Les chansons des bavarois accordéonistes ne nous enivrerons plus. Fini les verres de Riesling. Terminé les pintes de 1 litre. Pour autant, on se fait le projet d’ouvrir de ces tavernes immenses aux tables de bois marquetées, aux serveuses enveloppées dans de grandes robes traditionnelles émoustillantes. Projet en vain ou pas, il faut rester dans le ton. Au magasin, entre les rayons de charcuterie d’Italie, de France et d’Allemagne, on se plait à chercher la bouteille qui saura raviver le souvenir une fois revenu en France. Dans les rayons, foule d’étiquettes inconnues. Des noms aux sonorités teutonnes. On soupir un grand coup…quoi prendre. Une dernière discussion avec un autochtone. Celui-ci conclu bien. Il est jovial. Il me sourit et me sert presque la main avant de se ressaisir…moi je saisis sa main et la secoue comme il se doit. Il me cerne instantanément. Nous parlons anglais. Il sait me les vendre ses vins des vignes d’outre-rhin. Je me saisis de quelques bouteilles tandis que sa voix gourmande me décrit comme ce jarret de porc me conviendrait avec ses vins, ces vins particuliers qu’il me désigne.

Accompagner le vin :  Ce porc qu’il me décrit, il faut bien s’occuper de la couenne. La faire roussir au feu ou rôtir dans le beurre ou l’huile. On peut y ajouter du thym, des zestes de citrons. Quand le jarret est croquant sur le pourtour, l’homme se met à me parler de ces choucroutes de choux rouges marinés au vin blanc. Le résultat est légèrement sucré, parfumé de badiane et de poivre…il me replonge déjà dans mes souvenirs, me met à table sans couvert. Aujourd‘hui que j’écris ces lignes, la bouteille de GIES-DÜPPLER est là, à mes cotés. Munich hélas est loin et faire soi même des jarrets, de la choucroute, trouver un marché ou boire en se promenant au milieu des rayons de poissons ou de charcuteries est compliqué. Une fois là bas, il faut profiter. Au plaisir de l’ivresse inculte, Munich est irremplaçable.

Vincent BOILEAU

MUNICH – Les blancs Allemands – WEISSER BURGUNDER 2012// GIES DÜPPEL producteur

GIES-DÜPPLER – Weisser Burgunder: 11 euros –  Site : www.dallmayr-versand.de

weisser burgunder 2012 - vignobles allemagne

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